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— Sing

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SING - BOP'S

(2016, 6 min, Clip)

Équipe

Avec

André LAYUS

Germain COZIC-BOP

Okon JONES

Réalisation

Paul MARQUES DUARTE

Sélections &
Diffusions

· Clip du mois sur KuB

· Diffusé sur France 3 Bretagne (Le Grand BaZH.art)

· Prix du court-métrage - Festival Quai des Bulles

· Diffusé sur TVR

Critique

"Il est possible que le futur s’écrive avec des larsens et du rouge à lèvres

Le rock n’roll est aujourd’hui tellement ancré dans notre culture, qu’on est tentés d’oublier qu’il fut d’abord un outil de contestation morale, l’instrument d’une rébellion contre l’ordre établi, et en premier lieu contre la Loi du Père. C’est ce que vient nous rappeler ironiquement ce clip des rennais BOP’S, réalisé par Paul Marques Duarte.

La première moitié de la vidéo hésite entre les deux grandes voies qui pavent traditionnellement le territoire du clip. Débutant dans un haut lieu rock de la capitale bretonne (le Mondo Bizarro), elle semble s’inscrire dans le registre de la performance filmée : c’est donc à une représentation live de la chanson Sing qu’on va assister pendant quelques minutes, baignée dans une lumière rouge sang.

Mais très vite elle bifurque vers l’autre forme majeure du clip, celle qui lorgne en direction du court métrage de fiction : un homme part en voiture, d’un air pas content et résolu, après avoir découvert que son enfant a fait le mur. On suit son trajet jusqu’à la grange mal famée où son rejeton est allé se compromettre en jouant la musique du Diable, le visage et la bouche peinturlurés. Il entre et observe autour de lui, l’air ahuri, un monde qui visiblement le dépasse, puis fend la foule et empoigne le jeune loubard par le col, et l’extirpe manu militariavant de le fourrer dans sa voiture.

Comme dans un film de David Lynch ou un clip de Radiohead, il l’amène alors en forêt (plutôt un verger en réalité), et le poursuit dans la lumière des phares. C’est la terreur qui se lit surtout sur le visage du jeune rocker, au moment où le père s’apprête à le corriger à coups de ceinture. Mais de même que, comme disait Shakespeare, la plume est plus forte que l’épée, la guitare est plus forte que la ceinture, et le monde nouveau ayant finalement triomphé de l’ancien, un tunnel psychédélique ramènera le jeune BOP, en un coup de montage, à sa destination, pour qu’il puisse finir in extremis le morceau qu’il avait commencé de nous jouer. Hagard, le père rentrera la queue entre les jambes, mais avec, sur le visage, la marque d’un futur en marche, qu’on ne saurait arrêter.

À l’exception peut-être de ces vagues de neige visuelle qui parasitent l’image, « façon VHS », signe de nostalgie un peu incompréhensible pour des gens de vingt à peine (et pas franchement utiles au clip lui-même), il y a beaucoup de charme dans ce film impeccablement réalisé, rempli de chouettes idées de montage, et tout aussi chouettement éclairé. Les incohérences qui le traversent comptent peu, et participent même de la séduction qu’il exerce. Par exemple, pourquoi le père ne vient-il chercher que le chanteur, quand la biographie du groupe nous apprend qu’il est constitué d’une fratrie de trois ? Pourquoi a-t-il besoin de s’arrêter dans une station-service, quand tout indique que la grange bizarre n’est pas si éloignée de son domicile ? Enfin, pourquoi le concert a-t-il lieu, justement, dans une grange, quand le nom du Mondo Bizarro est clairement apparu à l’ouverture de la chanson ? Ces questions qui n’intéresseront que les tatillons, les universitaires et les coupeurs de cheveux en quatre, n’ont aucune importance, car le principal est ailleurs : à l’image de leur chanson et de la scène musicale dont ils se réclament, les BOP’S et l’équipe de réalisation qui les accompagne font valoir joyeusement leur droit à refuser (l’autorité, la décence, l’ordre et la morale) sans pour autant choisir (entre performance et court métrage, entre pop et stoner, entre récit et posture), c’est à dire, en un mot, leur droit à habiter gaiement la fin d’un monde. Il est très possible, comme on a pu le lire récemment sur les murs de la ville, que demain s’ouvre au pied de biche. Il est très possible aussi que le futur s’écrive en couleurs, bordéliquement, avec une chemise bariolée, des larsens et du rouge à lèvres."

- Eric Thouvenel - KuB

Making-of
 
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